Érudit éclairé des textes sacrés de l'Inde védique, penseur révolutionnaire et nationaliste, co-fondateur de la cité « idéale » d'Auroville et créateur du yoga intégral... Sri Aurobindo apporta au monde sa présence et sa verve pour plus de conscience et de connexion au divin. Retour sur son parcours de vie et décryptage de ses travaux et concepts fondamentaux.
Savoirs ancestraux
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« Selon moi, la valeur d’un homme ne dépend pas de ce qu’il apprend, de sa position, de sa célébrité ou de ce qu’il fait, mais de ce qu’il devient intérieurement » : cette confidence de Sri Aurobindo à un disciple traduit parfaitement le sens des forces qui gouvernèrent sa vie. Penseur et politicien d’avant-garde durant sa jeunesse, il renoncera à sa notoriété pour plonger dans l’exploration du soi et œuvrer à l’avènement d’une conscience supérieure, appelée « supramentale » et d’un yoga intégral explorant jusqu’au cœur des cellules.
Né en 1872 en Inde, dans l’état du Bengale, Sri Aurobindo Ghose est issu d’une famille bourgeoise cultivée. À l’âge de sept ans, il est envoyé dans un pensionnat anglais pour y poursuivre ses études. Au cours de ses années d’exil, il ne verra que rarement ses parents. Durant treize ans, il s’imprègne de la civilisation classique occidentale, maîtrise l’anglais à la perfection et lit les grands classiques. Ses années à l’étranger s’achèvent par le diplôme de l’université de Cambridge.
Le révolutionnaire mystique
De retour en Inde, il se plonge dans l’étude du sanskrit en autodidacte. Il remet en lumière les écritures sacrées indiennes : la Bhagavad-Gita, le Vedanta, les Upanishads… Loin de se consacrer à la seule étude, il s’engage dans le nationalisme militant doté d’un regard lucide et sans concessions sur l’occupant britannique. Aurobindo Ghose compte parmi les premiers à oser demander l’indépendance de l’Inde. Sa verve, empreinte de mysticisme et diffusée à travers les journaux, en fait l’âme du nationalisme indien. Il appelle à honorer son pays, l’Inde, qu’il nomme « la mère ».
Durant ces années, il traverse des expériences mystiques, d’abord lors de son arrivée à Bombay où il expérimente le silence profond au milieu de la foule. Puis dans une ruelle de Baroda, ville où il est au service du Maharadjah ainsi que son conseiller, le cheval de la voiture dans laquelle il se trouve est pris de panique et se cabre. La voiture risque d’être brisée par les ruades. C’est alors que surgit ce qu’Aurobindo désignera dans son journal comme un être de lumière :
« Je L’ai soudain senti, par-delà les sillons de la Nature, En moi, m’envelopper de Son corps. Au-dessus de ma tête surgit une tête formidable, […] Ses cheveux mêlés au soleil et à la brise ; Le monde était dans Son cœur et Il était moi. »
L’illumination en prison
Son engagement l’expose au public et aux autorités. Pourtant, en toutes circonstances, il conserve une constance, une équanimité et une gentillesse qui rappellent les sages yogis et qui provoquent la sympathie de ceux qui l’entourent. Le gouvernement britannique le soupçonne de fomenter un attentat et ordonne son arrestation. Son emprisonnement dure un an, une année qui devient une expérience d’illumination divine : il pratique le yoga immobile plusieurs heures par jour, au point que ses geôliers le prennent pour mort. Il réalise que le divin est en tout et partout, jusque dans sa cellule, transcendant les conditions spartiates de sa détention.
À sa sortie de prison, il se retire peu à peu du champ politique mais demeure auréolé de respect et d’admiration pour nombre d’Indiens. Un jour, un journaliste l’interviewe, il est marqué par la présence d’Aurobindo et lui demande d’où lui vient cet état :
« Oui, j’ai vu Krishna. J’ai eu toutes mes visions en état de veille. » Le journaliste demande : « Y a-t-il un moyen d’atteindre l’état dont vous parlez ? Oui, répond Aurobindo. Le Yoga est le moyen(1). »
Pondichéry
La situation politique s’envenime et bientôt, un mandat d’arrêt est une nouvelle fois lancé contre Aurobindo par les autorités anglaises. Sri Aurobindo prétend en avoir été informé grâce à une voix intérieure qui lui indique où trouver refuge. Au départ de Calcutta, au terme de quatre jours de navigation, il trouve refuge à Pondichéry, alors comptoir français. La ville est située dans l’état du Tamil Nadu dans le sud-est de l’Inde, terre des mystiques, des grands yogis appelés les siddhas qui détenaient la connaissance de l’immortalité, appelés aussi « les maîtres parfaits ». C’est ici que Sri Aurobindo va accomplir l’œuvre de sa vie, sa mission sur Terre : le développement du « yoga intégral » et l’émergence d’une vie nouvelle. Un soir, il reçoit la visite du maire d’une commune voisine. Celui-ci tient à lui raconter la prophétie du gourou de son grand-père, disparu trente ans plus tôt, qui affirmait qu’un yogi en provenance du Nord viendrait un jour se réfugier dans le Sud afin de pratiquer un yoga « intégral ».
Céline Chadelat est journaliste spécialisée dans les religions, la spiritualité, la santé et le bien-être.
Elle est autrice de trois livres dont le best-seller "Le Mois d'Or" et créatrice du compte instagram @lemoisdor.
Elle pratique la méditation depuis l'âge de 20 ans.
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