Et si le bonheur dépendait simplement de notre capacité à honorer l’instant présent ?
Dans ce témoignage bouleversant tiré du livre de Bronnie Ware, Les 5 regrets des personnes en fin de vie, Cath, une femme érudite et lucide, découvre en approchant de la fin de vie, l’importance du lâcher-prise, de la gratitude et de la beauté des choses simples. Une leçon de vie touchante, qui nous rappelle que chaque souffle ou chaque chant d’oiseau peut devenir un trésor, si l’on prend le temps de l’accueillir.
Fin de vie
Andrew Mckie / Pexels
De tous mes clients, Cath était de loin la plus grande
philosophe. Elle avait une opinion sur tout. Cependant,
ce n'était pas des opinions toutes faites, mais des
positions éclairées et vérifiées. Avide d'érudition et de
philosophie, elle avait absorbé une énorme quantité de
connaissances jusqu'à sa cinquante-et-unième année.
Cath avait vécu dans la maison ou elle était née. « Ma
mère est née et est morte ici. Je ferai la même chose »,
affirmait-elle avec détermination. .
Elle adorait aussi prendre des bains et les meilleures
conversations que nous eûmes au cours de nos deux
premiers mois ensemble se déroulaient généralement
quand elle était dans sa baignoire, avec moi assise
auprès d'elle, sur un tabouret. Appréciant moi-même
les bons bains, j'étais déterminée à aider Cath à profiter
de sa baignoire aussi longtemps qu'elle le pourrait.
Cependant, au bout d'un certain temps, elle s'affaiblit
et n'eut plus la force d'y entrer ou d'en sortir, même
avec mon aide. Le risque de chute était trop grand.
Quand elle sut que le bain de ce jour-là allait
être le dernier, elle se mit à pleurer et ses larmes se
mêlèrent à l'eau qui l'entourait. «Tout m'abandonne.
Et maintenant le bain, dit-elle en gémissant. Bientôt,
je serai incapable de marcher. Puis incapable de rester
debout, puis je partirai. Tout m'abandonne. Ma vie tire
à sa fin. » Ses pleurs se transformèrent en gros sanglots
sans retenue. Malgré la tristesse que je ressentais
pour elle et mes propres larmes prêtes à couler, j'étais
contente de voir quelqu'un capable de libérer ses
émotions avec une telle sincérité.
Du plus profond de son âme, Cath versa une rivière
de larmes. Quand elle avait l'impression de ne plus
rien avoir à sortir, elle s'asseyait tranquillement dans
la baignoire, épuisée d'avoir tant sangloté et se mettait
à fixer l'eau ou à dessiner des formes à la surface. Puis
elle recommençait, chaque sanglot venant d'un endroit
encore plus profond et plus primal que le précédent.
Elle pleurait pour chaque souvenir triste qu'elle avait
enfoui en elle, pour tous les gens qu'elle avait perdus,
pour tous ceux qu'elle perdrait en partant. Mais Cath
pleurait surtout pour elle-même.
Chaque fois que je faisais mine de partir pour lui
laisser un peu d'intimité, elle secouait la tête et me
demandait de rester. Je me rasseyais alors sur le tabouret,
lui envoyais de l'amour, en restant simplement présente
pendant qu'elle sanglotait. C'était déchirant, mais
salutaire en même temps de savoir qu'elle était en train
de lâcher prise en descendant si profondément en elle.
Au bout d'une autre demi-heure, le bain s'étant
refroidi, je lui proposai de rajouter de l'eau chaude.
Cath secoua la tête : « Non, tout va bien, il est temps
de sortir. » Sur ce, elle tira le bouchon de la baignoire
et me regarda pour que je l'aide à sortir. Quand je
la conduisis au soleil dans son fauteuil roulant peu
de temps après, enveloppée dans sa robe bleu pale et
chaussée de pantoufles rouge vif, elle semblait paisible.
« Écoutez cet oiseau », dit-elle en souriant. Nous
nous assîmes tranquillement pour écouter son chant
avec ravissement et nous sourîmes de plus belle en
entendant son partenaire lui répondre d'un autre arbre,
plus loin dans la rue. « Chaque jour est un cadeau
maintenant, vous savez. Ça l'a toujours été, mais ce
n'est que maintenant, alors que j'ai pu suffisamment
ralentir, que je prends vraiment conscience de
l'immense beauté que nous offre chaque journée.
Il nous arrive trop souvent de considérer les choses
comme allant de soi. Écoutez. » Des chants différents
nous parvenaient de quelques arbres proches.
Cath m'expliqua comment elle était parvenue à
comprendre l'importance de la force de gratitude.
« Il est trop facile d'exiger toujours plus de la vie,
disait-elle, et c'est normal jusqu'à un certain point,
étant donné que développer ce que nous sommes fait
partie du rêve et de la croissance. Mais comme nous
n'aurons jamais tout ce que nous voulons et que nous
progresserons toujours, apprécier ce que nous avons
déjà sur le chemin est la chose la plus importante. La
vie passe si vite, affirmait-elle, que vous viviez jusqu'
l'âge de vingt, quarante ou quatre-vingts ans. »
Elle avait raison. Chaque jour en soi est un cadeau et une
bénédiction. C'est de toute façon tout ce que nous
avons : le moment que nous sommes en train de vivre.
Durant les vingt dernières années, j'avais tenu
un « journal de gratitude » dans lequel j'inscrivais, à
la fin de la journée, certaines choses pour lesquelles
j'étais reconnaissante. Il y en avait souvent beaucoup.
Cependant, dans les périodes les plus sombres, j'avais parfois du mal à en trouver. L'épuisement émotionnel
me déprimait tant que j'étais obligée de faire des
efforts pour trouver quelques bienfaits. Cependant,
j'avais toujours persisté. Même dans ces moments-là,
j'arrivais à trouver des choses pour lesquelles remercier,
comme avoir de l'eau propre, quelque part où dormir,
de la nourriture, un sourire d'un étranger ou un chant
d'oiseau.
Mais, comme je l'expliquais à Cath, même si
j'appréciais ces choses à la fin de la journée au moment
où je les inscrivais dans mon cahier, il m'avait fallu
de l'entraînement pour prendre aussi l'habitude
de les apprécier au moment où elles survenaient,
particulièrement en ce qui concerne les choses
complexes. Au bas mot, réciter une prière silencieuse
de remerciement au moment précis où un cadeau vous
est donné était une nouvelle habitude à créer.
La nature avait toujours reçu des remerciements dans
l'instant, définitivement. Je lui donnais un exemple en
lui disant que si une douce brise venait caresser mon
visage, j'étais reconnaissante d'être en assez bonne santé
pour être dehors et en jouir. Bien qu'écrire ce journal
m'ait fait accéder à un niveau supérieur de gratitude, le
fait de vivre davantage dans le moment présent m'avait
permis d'exprimer ma reconnaissance dans chacune de
mes situations quotidiennes. À chaque heure qui passe,
il y a des choses pour lesquelles remercier, avais-je
décidé et c'est ainsi que j'en avais créé l'habitude.
« Alors, vous recevez beaucoup de bénédictions, si
vous êtes reconnaissante sur le chemin ? » demanda
Cath.
« Oui, Cath, quand je leur laisse la voie libre, quand
je me souviens de ma propre valeur et les laisse affluer. J'ai vraiment reçu de grandes bénédictions dans ma
vie. Parfois, il me suffit simplement de sortir de mes
ornières. Il en est ainsi pour tout le monde, les bienfaits
sont plus nombreux quand je suis dans un état de
gratitude et d'abondance. »
Cath rit de ma théorie et admit : « Oui, ils ne
demandent qu'à venir à nous. Mais si nous manquons
de reconnaissance et que nous ne nous autorisons pas à
les recevoir, nous les bloquons, je pense. La plupart des
gens ne réalisent pas la chance qu'ils ont. Moi-même,
je n'en ai pas eu conscience pendant longtemps. Mais
heureusement, j'ai commencé à comprendre avant que
cette maladie ne me frappe et j'ai donc pu vivre en
m'appuyant sur un état intérieur plus profond. » (…)
Les 5 regrets des personnes en fin de vie, Éditions Guy Trédaniel, 2014.
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23 juin 2013
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