• Inexploré TV
  • Inexploré

Ces
plantes
qui
nous
ressentent

Et si le monde végétal n’était pas aussi inerte qu’on l’imagine ? Les plantes ont beau n’avoir ni cerveau, ni cordes vocales, ni système nerveux, elles seraient en réalité loin de « végéter ».
Ces plantes qui nous ressentent
Art de vivre
On sait déjà que les végétaux sont capables de « se parler » entre eux pour se prévenir d’un danger, en s’envoyant de savants cocktails chimiques. Cette découverte a été faite un peu par hasard à la fin des années 80, durant une période de sécheresse en Afrique du Sud. À l’époque, la végétation se faisant de plus en plus rare, les grands herbivores n’ont guère plus que les feuilles d’acacia pour se nourrir. Soudain, dans plusieurs fermes à gibier clôturées, les koudous meurent en masse, de manière inexpliquée.

Une enquête est alors menée par Wouter Van Hoven, éminent biologiste de la conservation à l’université de Pretoria, pour tenter d’élucider la cause de ces nombreux décès. Rapidement, il établit un lien entre la densité des koudous dans certaines fermes, et le taux de mortalité. Après plusieurs autopsies, il constate que ces antilopes ont été intoxiquées par une quantité inhabituelle de tanin d’acacia dans l’estomac. En analysant les feuilles de ces arbres typiques de la savane africaine, habituellement inoffensifs, il note une quantité de tanin quatre fois plus élevée dans les fermes où ces antilopes sont en surnombre. On découvre alors que pour survivre et lutter contre une surconsommation, l’acacia empoisonne ses assaillants. Plus surprenant encore, même les acacias situés à l’extérieur des clôtures, épargnés par les koudous, ont augmenté leur concentration de tanin. Une série de prélèvements et d’expériences permettront à Wouter Van Hoven de prouver scientifiquement que l’acacia, aussitôt agressé, émet un signal d’alarme en diffusant un gaz incolore et inodore – l’éthylène – qui, une fois libéré, prévient ses semblables d’un danger, même à plusieurs kilomètres. Non seulement cet arbre perçoit l’agression des herbivores et la mémorise, mais il anticipe les risques encourus par ses congénères, en les avertissant d’une éventuelle menace. Cette communication chimique élaborée rappelle celle de certaines fourmis qui, lorsqu’elles sont menacées, libèrent de l'acide formique pour alerter les autres membres de la fourmilière et neutraliser l’agresseur.

Les plantes perçoivent leur environnement avec un réel savoir-faire.


Les plantes se parlent


Publiée fin février 2012 dans la revue scientifique PLOS One, les conclusions d’une étude plus récente menée par des chercheurs de l’université Ben Gourion, en Israël, ont démontré que les plantes ayant subi un stress étaient capables d’échanger des informations indispensables à leur survie, en émettant des signaux d’alerte, cette fois-ci par les racines, pour prévenir leurs voisines d’une menace. Selon le professeur Ariel Novoplansky, directeur des recherches, les résultats de cette étude tendent à prouver que les plantes, en s’échangeant des signaux souterrains, seraient capables de répondre à divers défis environnementaux par des moyens de communication qu’on avait jusqu’alors attribués aux organismes dits supérieurs, comme les oiseaux ou les mammifères. Peut-on alors parler d’une intelligence des plantes ?


Ce sujet vous passionne ?

AMOUR : vous souhaitez approfondir et tout connaître de cette thématique ? Inexploré vous propose son parcours initiatique numérique…

Découvrir notre odyssée

Plus évoluées que les humains


« Les plantes sont bien plus évoluées que nous », répond le célèbre botaniste Francis Hallé. L’être humain, qui se croit au sommet de l’évolution, compte 26 000 gènes dans son ADN. On a découvert que le génome du riz en détient 50 000. Le double ! Ça a été un choc pour les biologistes, qui pensaient que plus un organisme était évolué, plus il comptait de gènes. Fallait-il tout revoir ? « Pas du tout, nous a répondu le généticien Axel Kahn, le riz est indiscutablement plus évolué que l’homme : essayez donc de passer l’hiver le pied dans l’eau froide, à vous nourrir exclusivement de lumière, de soleil et de gaz carbonique. Vous n’y arriverez pas, car votre équipement génétique est insuffisant. En réalité, les règnes animal et végétal ne sont pas en compétition. Nous sommes partis dans deux directions différentes. L’animal est mobile, la plante ne l’est pas : les végétaux ont dû développer une astuce largement supérieure à la nôtre. C’est ainsi qu’ils sont devenus des virtuoses de la biochimie. Pour communiquer. Pour se défendre. Toutefois, selon moi, parler d’intelligence n’est pas très approprié au règne végétal. L’intelligence suppose d’être capable de faire des choix, bons ou mauvais, d’hésiter et d’être, de fait, à même de commettre des erreurs. Les plantes, elles, agissent de manière automatique, et ne se trompent jamais. Elles sont, en revanche, d’une extrême sensibilité. Bien plus que nous autres humains. Elles sentent, par exemple, l’attraction lunaire correspondant aux marées ou les petites variations du champ magnétique terrestre avant un tremblement de terre. »

Depuis près d’un siècle, quelques scientifiques passionnés cherchent à comprendre la sensibilité du monde végétal au prix de multiples expériences dignes d’un régiment de tortionnaires : anesthésie au chloroforme, stimulation à la bougie, mise sous tension électrique. Aujourd’hui, l’université de Bonn, en Allemagne, compte parmi les instituts de recherche les plus actifs en matière de comportement des plantes. On y étudie aussi bien les systèmes de perception du petit pois que la structure cellulaire des racines de maïs. « Nos résultats ces dernières années, comme ceux de nombreux collègues du monde entier, ont montré que les plantes perçoivent leur environnement avec un réel savoir-faire », affirme le biologiste Dieter Volkmann dans un documentaire de Jacques Mitsch, intitulé L’Esprit des plantes (1). Dans ses expériences, le chercheur utilise des techniques simples. « Si nous stimulons les vrilles [pièces foliaires correspondant à un organe spécialisé permettant aux plantes rampantes ou grimpantes de s’accrocher à des supports, NDLR] du petit pois avec un bâton quatre ou cinq fois seulement, elles vont pousser dans le sens de la stimulation, même après qu'on ait enlevé le bâton. Ce mécanisme de croissance permet au petit pois une exploration tous azimuts de son environnement immédiat. Chez les plantes, il existe une vraie motricité, accompagnée de sensations. »

Une autre plante, la sensitive, qui se recroqueville dès qu’on l’effleure, a fait elle aussi l’objet de nombreuses expériences, tout comme la Desmodium gyrans qui danse comme une ballerine au rythme de la musique. « Pour nous, scientifiques, cela pose un énorme problème, concède Francis Hallé. D’abord parce que nous ne savons pas comment cela marche. Ensuite, parce que nous ne savons pas à quoi cette originalité lui sert exactement. Cela reste un mystère ! Nous ne savons toujours pas non plus si, de manière plus générale, les plantes sont sensibles aux ondes sonores mais j’ai vu, dans beaucoup de champs en Inde, des installations stéréophoniques avec des haut-parleurs qui diffusaient de la musique. Les Indiens m’ont affirmé avoir constaté depuis une amélioration des rendements. Rien n’a jamais été démontré mais s’ils font cela, c’est qu’il y a une raison ! »

Le monde végétal est si mystérieux qu’il laisse place à tous les fantasmes.


(...)

L'accès à l'intégralité de l'article est réservé aux abonnés « Inexploré digital »

À
propos

auteur

flower

À
retrouver
dans

Inexploré n°17

Communiquer avec la nature

dernière parution

Nous vivons coupés de la nature, et nous en avons la nostalgie. Pourtant, cette séparation n'existe que dans nos têtes; nous sommes beaucoup plus proche de la nature que nous le croyons. Nous faisons partie de cette nature vivante, intelligente : l'observation nous apprend que les animaux et les plantes savent ce que nous pensons, ce que nous allons faire, réagissent en conséquence, et parfois pressentent avec justesse ce qui va se produire. Et si l'on pouvait communiquer avec la nature ?

flower

Les
livres
à
lire

  • Eloge de la plante

    Eloge de la plante

    par Francis Hallé

Voir tous les livres

Les
articles
similaires

  • Thierry Janssen : à la recherche de l’esprit
    Santé corps-esprit

    À force de découper et de compartimenter la réalité pour mieux la comprendre, n’avons-nous pas perdu de vue l’essentiel ? Pour Thierry Janssen, ce sont les liens entre toutes les dimensions de la personne humaine qui lui donnent un sens.

    9 septembre 2011

    Thierry Janssen : à la recherche de l’esprit

    Lire l'article
  • Se libérer de nos croyances limitantes
    Art de vivre

    Face aux événements bouleversant nos représentations à grande vitesse, nous avons besoin de davantage de flexibilité, de développer de nouvelles ressources et capacités. Pour nous réinventer et créer des modèles de société innovants, il faudrait nous libérer de nos croyances limitantes ...

    23 septembre 2021

    Se libérer de nos croyances limitantes

    Lire l'article
  • La nature est consciente
    Nature

    Dans cet entretien, Rupert Sheldrake, docteur en biologie de l’université de Cambridge, revient sur les origines de la séparation entre l’être humain et la nature, et propose une autre conception, fondée sur l’existence de champs qui nous relient à elle.

    21 avril 2013

    La nature est consciente

    Lire l'article
  • La forêt qui cache l'arbre
    Nature

    C’est un fait établi, les arbres communiquent, échangent et s’entraident. Si l’on voyait simultanément sous la terre, la forêt nous apparaîtrait même comme un seul organisme. Découverte d’un univers végétal aux connexions vertigineuses.

    29 mars 2018

    La forêt qui cache l'arbre

    Lire l'article
  • Identifier ses émotions, un atout pour vivre mieux
    Art de vivre

    Les personnes dépressives ont du mal à identifier et à distinguer les émotions négatives telles que la tristesse, la frustration, ou la culpabilité. C'est ce que révèle une étude menée par une équipe de l’Université du Michigan, qui nous apprend ...

    16 octobre 2012

    Identifier ses émotions, un atout pour vivre mieux

    Lire l'article
  • Des neurones au Cosmos : tout est relié ?
    Sciences

    La dernière révolution quantique tend à prouver ce que beaucoup de penseurs et chercheurs questionnent depuis des siècles : tout semble relié dans l’Univers, du plus grand au plus petit. Des similitudes structurelles entre notre cerveau et l’Univers viennent illustrer ...

    3 août 2023

    Des neurones au Cosmos : tout est relié ?

    Lire l'article
  • Trésors de l’ombre
    Santé corps-esprit

    Par sauvegarde, notre psyché peut refouler les émotions, parfois aussi ce sont nos parents ou des adultes qui nous ont amenés à réprimer ce que nous ressentons. Plus tard, cette « part d’ombre » peut nous empêcher d’avancer dans la ...

    23 décembre 2020

    Trésors de l’ombre

    Lire l'article
  • Magie verte : les plantes, vos alliées ?
    Nature

    La magie verte est une pratique qui se concentre sur l’utilisation des plantes, des herbes et de la nature à des desseins magiques, spirituels ou thérapeutiques. Et si nous saisissions cette occasion pour nous reconnecter à l’essentiel ?

    20 juin 2024

    Magie verte : les plantes, vos alliées ?

    Lire l'article
Voir tous les articles

Écoutez
nos podcasts

Écoutez les dossiers audio d’Inexploré mag. et prolongez nos enquêtes avec des entretiens audio.

Écoutez
background image background image
L’INREES utilise des cookies nécessaires au bon fonctionnement technique du site internet. Ces cookies sont indispensables pour permettre la connexion à votre compte, optimiser votre navigation et sécuriser les processus de commande. L’INREES n’utilise pas de cookies paramétrables. En cliquant sur ‘accepter’ vous acceptez ces cookies strictement nécessaires à une expérience de navigation sur notre site. [En savoir plus] [Accepter] [Refuser]