Icône du sage spirituel à barbe
blanche, ce grand maître d’origine
bulgare qu’était Omraam Mikhaël
Aïvanhov nous a transmis un
gigantesque enseignement. Entre
héritage des Évangiles, spiritualité du
quotidien ou compréhension de
l’amour universel, il inspire encore
aujourd’hui par sa simplicité et sa
justesse. Découverte d’un maître à
l’occidentale.
«
Il m’introduit dans un petit salon et, d’un geste
courtois, m’invite à m’asseoir puis à méditer. Cette
conversation silencieuse est bien étrange, me dis-je,
tout en notant qu’elle a bien lieu. On dirait que dans
cet état de conscience, nous nous transmettons sans
mot dire notre réalité du moment. […] Alors qu’il
entreprend de m’expliquer l’essence de son enseignement,
je l’écoute poliment mais n’entends rien, trop
absorbée par la sensation qui me gagne. Je me sens
enveloppée d’un flux de pure beauté. Aimée, sans savoir
ni comment ni pourquoi. Tandis que ces pensées
m’envahissent, je me rends compte soudain qu’au-delà
des mots qu’il prononce, j’entends le sens de ce qu’il me
dit. L’expérience télépathique se poursuit bizarrement
dans l’échange verbal », raconte la philosophe Arouna
Lipschitz, qui révèle aujourd’hui, trente-quatre
ans après cette rencontre à Sèvres, le nom de son interlocuteur.
Le maître O. mentionné dans ses livres
Dis-moi si je m’approche et
L’un n’empêche pas l’autre
(éd. Souffle d’or, 2003), n’est autre qu’Omraam
Mikhaël Aïvanhov (1900-1986).
L’homme, d’origine
bulgare, enseignait à cette époque à Sèvres et
à Fréjus, aux centres de la Fraternité Blanche universelle,
association qu’il avait fondée en 1947. Ce
nom, traduit de sa langue maternelle, lui a été inspiré
par Peter Deunov, son propre maître, né à la fin
du XIXe siècle en Bulgarie, et qui l’avait envoyé en
France en 1937. Par « Fraternité Blanche », entendez
plutôt «
fraternité d’hommes en lien avec de grands
prophètes, initiés et autres êtres éclairés, dont l’histoire a
retenu les noms de Bouddha, Jésus... », le blanc
renvoyant symboliquement à la lumière.
Cette association culturelle s’attache
à transmettre l’enseignement
d’Omraam Mikhaël Aïvanhov.
Elle a été épinglée dans le rapport
sur les mouvements sectaires de
1995 (sans qu’aucune raison ne
soit apportée) et l’homme a été,
en 1948, au centre d’un scandale
l’amenant à passer deux ans
en prison. Il est difficile de savoir
s’il a été coupable de quelque chose,
ou la victime d’un complot, comme il
l’a toujours affirmé, mais il est réhabilité le
28 septembre 1960 par la cour d’appel d’Aix-en-
Provence. L’écrivain et traducteur Olivier Clerc rappelle
également : «
Il faut juger l’arbre à ses fruits. »
Malgré tout, on constate que de nombreux grands
noms s’inspirent de sa pensée, tous séduits par sa
force et son intelligence.
Pendant cinquante ans, Aïvanhov a donné plus
de 4 500 conférences, d’abord en France puis aux
États-Unis, en Inde et dans bien d’autres pays du
monde. Arouna Lipschitz a eu la chance de recevoir
directement son enseignement quelques
années avant son décès en 1986. Elle découvre
alors auprès de lui ce qu’est la dimension initiatique
dans la spiritualité, sa démarche visant à
mieux s’accomplir sur Terre comme être humain :
«
Mon enseignement est celui du
triangle vers le bas. Vous devez
comprendre qu’aujourd’hui, il
faut une évolution spirituelle involutive,
une descente. C’est la matière,
à commencer par notre corps, qui doit
être illuminée aujourd’hui. L’esprit est assez
lumineux en lui-même, vous ne pensez pas ? » Elle a
très vite été touchée par la notion de conscience
fraternelle comme enjeu même de la spiritualité.
Alors qu’elle venait de prendre la robe orange de
Swami en Inde, ce maître lui dit qu’il n’était pas
nécessaire d’aller chercher ailleurs ce que nous
avons ici : «
Quand on est né en Occident, dans un
pays de tradition chrétienne, ce n’est peut-être pas un
hasard, il y a une raison. »
Les Évangiles comme référence
C’est dans la relation à l’autre, dans l’amour,
qu’Aïvanhov invite à incarner une spiritualité bien
vivante. «
On est un peu aux antipodes des spiritualités
orientales tournées vers la réalisation du Soi, sans passer par l’autre », explique Arouna Lipschitz.
Elle voit dans son enseignement une passerelle entre
les traditions juive et chrétienne, car il était à la fois un
grand kabbaliste et un amoureux des Évangiles auxquels
il faisait souvent référence dans ses conférences,
retranscrites dans plus d’une centaine d’ouvrages(1).
Comme Jésus, il insiste sur l’amour et l’échange :
«
Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés.
» Comment amener une dimension d’amour
pur dans la relation ? Comment apprendre à donner
et à recevoir ? Comment devenir de vrais amoureux
? Comment cocréer notre destin, celui
du monde et de l’humanité ? «
Le test de
toute spiritualité se fait dans la relation.
Là est le vrai sens de l’incarnation. Si
on ne se confronte pas à l’autre, on vit
alors une spiritualité détachée de la
réalité », insiste Arouna Lipschitz.
C'est dans la
relation à l'autre,
dans l’amour,
qu'Aïvanhov invite
à incarner une
spiritualité bien
vivante.
Chez Aïvanhov, le lien est partout
: entre soi et l’autre, mais aussi
dans la nature visible et invisible.
Olivier Clerc explique être très
touché par ces liens subtils : «
Avec
ce maître, j’ai eu l’impression de suivre
un cours accéléré d’alphabétisation symbolique.
J’ai découvert ce lien, cette unité, cette cohésion
totale entre toutes choses, entre l’être humain et
l’univers, le microcosme et le macrocosme. Je trouve
ça d’autant plus génial qu’on peut communiquer
facilement cette “intelligence du monde” aux enfants.
Il y a quelque chose de rare chez Aïvanhov,
c’est sa simplicité ! » À travers des analogies, il se
réfère aux grandes lois à l’oeuvre dans l’univers(2) :
«
Quel est l’alpiniste qui pourrait faire l’ascension
d’une montagne s’il avait devant lui des parois
parfaitement lisses ? [...] C’est grâce aux aspérités
(obstacles, épreuves, hostilités) auxquelles on s’accroche
qu’on parvient à s’élever… » Il montre que
tout a une juste place et une utilité. Aussi, il se
plaît à « spiritualiser » les actes de la vie quotidienne,
comme se laver, cuisiner, manger, marcher...
et même respirer. Par exemple, prendre
sa douche en posant cette intention « Que cette
eau me libère de toutes les impuretés » change
tout, explique Frédérique Sicard, qui a construit
sa méthode thérapeutique et énergétique en partie
autour de l’enseignement d’Aïvanhov. Mais
attention, insiste-t-elle, encore
faut-il pratiquer pour en voir
les effets !
La puissance de la pensée
Dans sa compréhension des lois de l’univers,
Aïvanhov considère la puissance de la pensée(3) :
«
Toutes les pensées, les plus faibles et les plus insignifiantes
soient-elles, sont une réalité [...] Évidemment,
dans le plan physique, la pensée reste invisible
et insaisissable mais elle est réelle et, dans sa région,
avec les matériaux subtils dont elle est faite, c’est une
créature vivante et même agissante.
L’ignorance de
cette vérité est la cause de beaucoup de malheurs.
Les humains ne voient pas, ne sentent pas que la
pensée travaille, qu’elle construit, ou bien qu’elle
déchire et démolit. »
Hubert Mansion, ex-avocat
international, également auteur et conférencier,
considère Aïvanhov comme le plus grand maître
du XXe siècle. Enthousiaste, il précise : «
Quand
on parle de pollution, on se réfère sans cesse à l’extérieur,
alors que la véritable pollution est avant
tout intérieure ! » Pour le philosophe, il est à la
fois important d’apprendre à contrôler ses pensées
et à les mettre en harmonie avec soi-même,
mais aussi de savoir raisonner juste et bien utiliser
son mental. La vie intérieure obéit à la loi
de l’affinité, explique-t-il : «
Commencez par purifier
et éclairer vos sentiments et vos pensées, sans vous demander sous quelle forme viendra l’aide que
vous avez demandée.(4) » D’une manière générale,
Aïvanhov encourage à se fixer un haut idéal, à
l’image de Jésus qui disait : «
Cherchez d’abord le
Royaume de Dieu et sa justice et tout le reste vous
sera donné par surcroît. » Moins on s’attache à ce
qui est vulnérable, meilleurs seront les fruits récoltés.
Aussi, le maître invente la «
galvanoplastie
spirituelle » pour inciter les femmes enceintes à
être particulièrement attentives à leurs pensées.
(...)