Il y a plusieurs mois, je franchis la porte de ce moulin datant de 1850… Après des années de recherches infructueuses, la lassitude est palpable. Mais à mesure que nous parcourons les pièces, un sentiment fort me gagne : à l’évidence, c’est ici que nous devons vivre ! La veille de la signature du compromis, je fais un rêve étrange. Il n’y a pas d’images, simplement des sons qui me mettent mal à l’aise – j’entends des femmes gémir bruyamment. Je me réveille, et c’est la stupéfaction : le bruit est toujours là, omniprésent dans la pièce… Je suis confuse, et le temps semble altéré, comme suspendu. J’aperçois alors plusieurs silhouettes sombres traverser les murs, l’une d’elles venant s’asseoir sur ma poitrine, si bien que je peux à peine respirer. Après cette nuit d’effroi, nous nous rendons chez le notaire. Le propriétaire m’attend sur place… « Savez-vous que votre future maison a une histoire atypique ? » m’annonce-t-il. C’était autrefois un hôtel… où les prostituées du coin venaient se reposer ! Plus tard, la maison a appartenu au frère de l’assassin Mesrine, qui y a d’ailleurs effectué lui-même un court séjour lors de sa fuite. Je suis stupéfaite, tant ces informations font écho aux « visites » de la nuit précédente…

Nombreux sont ceux qui, à la recherche d’un lieu d’habitation, sont l’objet de phénomènes surprenants : des synchronicités, des rêves, ou d’autres événements qui sembleraient confirmer que cette rencontre devait avoir lieu. Comment expliquer ces résonances entre l’habitant(e) et l’habité(e) ? Pourquoi ces rencontres semblent-elles « orchestrées », et à quel dessein ?

L’habitat… fait le moine !

Bruno Verdier est un ancien chef d’orchestre, qui a dirigé des conservatoires, des chœurs et bien évidemment, des orchestres…

Lui aussi témoigne d’un « coup de foudre » éprouvé lors de la visite de sa maison. « J’en avais visité plusieurs avec ma compagne, sans résonance particulière. Cette fois-là, j’ai su que c’était la bonne en passant le pas de la porte. C’était une conviction très claire et très ferme, comme un : “Bonjour, je t’attendais.” Je me suis demandé pourquoi cette maison datant d’avant 1800, sans intérêt particulier et en mauvais état, m’avait tant attiré… » L’intensité de ce qu’il vit alors le pousse à s’interroger, à se mettre à l’écoute pour comprendre ce qui se passe dans ce lieu. Il est régulièrement témoin du passage de « présences » invisibles, et un dialogue semble se tisser entre lui et sa maison. C’est une des raisons pour lesquelles il se tournera plus tard vers le métier de géobiologue : « La connexion avec l’âme de ma maison a développé en moi le besoin, le désir d’aller trouver les âmes d’autres maisons dans lesquelles j’ai été convié. »

Quelles circonstances font que nous décidons de notre lieu d’habitation, parfois en dépit de ce que nous dicte la raison ? L’écrivain et psychologue François Vigouroux décrit bien l’attirance mystérieuse que l’on peut ressentir pour un lieu de vie, dans son livre L’âme des maisons ⁽¹⁾ : « Certaines maisons semblent nous appeler, comme si elles avaient une volonté propre. Elles attirent ceux qui ont besoin de leur protection, de leur réconfort, et cela crée un lien indéfectible entre l’habitant et son espace. » « Votre maison, c’EST vous », affirme également Bruno Verdier.

Des histoires imbriquées

« Comme de longs échos qui de loin se confondent, dans une ténébreuse et profonde unité », disait Charles Baudelaire, dans son poème « Correspondances ». (...)