Éprouver le noir, faire face à ses peurs et laisser mourir nos fausses croyances sur nous-mêmes... Une transformation profonde semble possible dans la rencontre avec la nuit.
Perceptions
Sébastien Duijndam - Dalam Images
« En chinois, le noir, le sombre et le mystérieux sont identiques. Donc pour nous, faire l’expérience du mystère et du noir, c’est la même chose. Ma tradition s’appelle le Grand Secret, nous pourrions aussi l’appeler le Grand Noir », indique Serge Augier, héritier de la tradition taoïste Ba Men Da Xuan dont la lignée est vieille de plus de 1 000 ans. Ainsi, cet enseignant propose parfois à ses élèves des initiations dans l’obscurité. « Lors d’une nuit sans lune, j’ai passé de nombreuses heures au cœur d’une forêt avec des instructions à suivre », témoigne Laetitia Chevillard, qui enseigne désormais dans l’école de Serge Augier et pratique la médecine traditionnelle chinoise.
Que permet cette rencontre avec la nuit ? « Le noir va tout d’abord révéler tout ce qu’il y a à l’intérieur de nous, et notamment la nature réelle de nos peurs. La plus profonde est celle de la mort. Dans notre tradition, nous comprenons que pour vraiment vivre, il faut accepter de mourir. Pour cela, nous avons de nombreuses pratiques dans le noir », informe Serge Augier. C’est que la rencontre avec le grand mystère ne pourrait se faire que par étapes. Pas à pas, des seuils se franchissent, des peurs se traversent, une déconstruction de qui nous pensons être s’opère afin que se manifeste une dimension plus large que notre personnalité.
Seule dans la nuit, Laetitia a pour instruction de fixer un endroit sombre en pratiquant une forme de respiration spécifique. La forêt bouge au gré de la brise et des mouvements des animaux qui l’habitent. Toutes sortes de bruits, d’odeurs, sont perceptibles. Par vagues, des milliers de réactions de peur apparaissent en elle. Son mental conscient essaie de les rationaliser, voire de les nier. « Comme les humains sont super créatifs, cela prend du temps pour épuiser toutes les raisons ou explications possibles aux choses que nous percevons », témoigne Laetitia Chevillard. Combien dure une minute quand vous n’avez pas votre montre sous les yeux ? Une éternité, parfois. Le noir révèle ainsi nos systèmes de défense et les constructions fallacieuses que nous avons réalisées pour pallier, entre autres, nos peurs. « Notre perception de nous-mêmes, c’est deux tiers de mensonges et un tiers de fantasmes. Ce n’est pas toujours rigolo de se rencontrer vraiment. Mais au fur et à mesure que nous acceptons de mourir à cela, c’est notre nature spirituelle qui émerge », détaille l’enseignant qui a lui-même effectué de nombreuses et longues retraites dans le noir.
Le noir va tout d’abord révéler tout ce qu’il y a à l’intérieur de nous, et notamment la nature réelle de nos peurs.
Changement de décor, progressivement une autre dimension se dévoile. « Même si la peur continuait à aller et venir, et que mon mental inventait toujours des choses, c’est devenu moins puissant. Ça a commencé à lâcher. Une sensation de force est apparue. Je me suis sentie comme happée par quelque chose de plus grand », confie la jeune femme. « Là, nous pouvons alors avoir des contacts avec nos ancêtres, notre lignée, les esprits », complète l’enseignant dont l’école propose certaines pratiques ésotériques. « Il arrive que nous travaillions avec des éléments beaucoup moins palpables que notre réalité. Cela fait partie de la lignée, d’être capable de faire appel à cela à certaines fins utiles. Ainsi, lors de mon expérience, Serge Augier a appelé une armée de Gui – des fantômes », dévoile Laetitia Chevillard.
Bruits étranges et inconnus qui semblent n’appartenir à aucun animal, sensation d’effleurement. La jeune femme se sent entrer en contact avec les Gui : la terre paraît trembler sous ses pieds ; elle sent des Gui l’attraper et l’attirer vers le fond, dans des sables mouvants. « C’était d’un réalisme incroyable. Alors que quand tout s’est arrêté, le sol était bien dur. Donc pendant l’expérience, je n’étais plus vraiment dans la réalité, et pourtant, j’étais quand même dans une forme de réalité. Dire que tout n’est que projection me paraît égotique. Je pense surtout que le dedans et le dehors se font écho. Les Gui sont une forme d’énergie qui se manifeste », propose Laetitia Chevillard.
La rencontre avec l’obscurité est puissante. Révélatrice de nos dimensions intérieures construites autant qu’innées, elle nous donnerait aussi la possibilité de toucher « la porte de l’invisible ». « Nos sociétés font avec la nuit ce qu’elles font avec la mort : elles l’évitent. Mais en échappant à la nuit, nous nous détournons de ces moments qui nous enseignent que notre mental n’est pas tout-puissant et qu’il existe une dimension spirituelle qui nous dépasse », conclut Serge Augier.
À
propos
auteur
Miriam Gablier
Auteure et journaliste
Titulaire d'un Master de philosophie, de diplômes de thérapie psycho-corporelle et d'homéopathie (Grande-Bretagne), Miriam Gablier s'intéresse particulièrement au potentiel humain et à l'intelligence du vivant.
Ses enquêtes sur les thérapies, la psychologie, la philosophie, la spiritualité et les sciences du vivant, lui permettent notamment de traquer les données se rapportant à la notion de conscience et à la relation corps-esprit.
Miriam Gablier est auteure de Les mystères de la conscience ...
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La Nuit
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