Audry Henriet commence son parcours en tant qu’infirmière en psychiatrie. Elle y travaillera pendant dix ans, dont quatre passés dans un service accueillant des patients atteints de troubles psychotiques. Pourtant, en 2005, elle ressent le besoin de quitter cet environnement : « Je ne me sentais plus à ma place et j’avais envie d’autre chose. » C’est ainsi qu’elle se forme en sophrologie, une discipline qu’elle pratique tout en poursuivant sa quête intérieure.

En 2008, lors d’un enterrement, Audry vit une expérience bouleversante qu’elle qualifie d’« émergence spirituelle spontanée ». Cet événement la confronte à des perceptions inconnues et puissantes : « J’ai ressenti la présence de cette maman décédée. Mon corps réagissait avec énormément de tristesse et je ne comprenais pas. » Face à cette réaction disproportionnée, elle se rend dans une grotte dédiée à la Vierge Marie et entend une voix pour la première fois. Cette expérience, bien qu’incompréhensible pour elle à l’époque, marque le début d’une transformation profonde. Elle va commencer à « entendre » régulièrement, tout en explorant la différence d’avec les voix entendues par les schizophrènes.

« Mon mental me disait “tu es en plein délire mystique”, et en même temps, je voyais bien que ce n’était pas ça, parce que mon travail était d’analyser les hallucinations des patients. Je voyais bien que je pouvais fonctionner, m’occuper de mes enfants, de ma maison, mon travail… Et je me disais, si ce n’est pas une psychose, qu’est-ce que c’est ? Cela a été ma quête pendant huit ans. Donc j’ai refusé, refusé, refusé. J’ai tout rejeté. Durant toute cette période, finalement, j’ai beaucoup souffert parce qu’on ne peut pas rejeter ce qu’on est », témoigne-t-elle. Au fil des années, elle commence à accepter ses perceptions extrasensorielles, malgré la souffrance liée à leur rejet initial. En 2013, Audry traverse une autre expérience marquante : une expérience de mort imminente (EMI) suite à une intervention chirurgicale. Cet événement intensifie encore ses perceptions et son besoin de comprendre, tout en renforçant sa conviction que son cheminement n’est pas celui d’une pathologie mentale, mais bien d’un éveil spirituel. Cependant, réconcilier ces expériences avec son passé médical n’est pas simple. Elle s’interroge sur la manière d’intégrer ces phénomènes dans une perspective plus large : « Pour moi, la clé est dans l’interprétation et l’intégration, parce qu’on ne peut pas accompagner uniquement dans le cadre matérialiste. »

Audry suit alors un parcours d’une quinzaine d’années, ponctuées de nombreuses formations (médiumnité, transe parlée…) et d’une activité bénévole au sein du REV (réseau sur l’entente de voix), où les voix sont perçues comme porteuses de sens pour la personne concernée – il convient donc de les écouter. Aujourd’hui, elle partage son expérience à travers un podcast destiné à offrir une plateforme aux personnes ouvertes à ces réalités spirituelles : « L’idée derrière ce podcast est d’offrir ce que j’ai cherché pendant huit ans : une liste de professionnels aguerris qui vont pouvoir entendre et accompagner, pathologie ou pas. » Son parcours, entre santé mentale et éveil spirituel, montre combien il est crucial de dépasser les clivages pour accueillir la complexité de l’expérience humaine. Audry Henriet nous rappelle que l’éveil spirituel, bien qu’inconfortable, peut être un puissant vecteur de guérison et de transformation.