Aide-soignante, Christelle Dubois a développé une communication intuitive avec des personnes mourantes ou dans le coma. Une approche qui pourrait ouvrir un nouveau champ des possibles pour les proches, souvent démunis.
« Il y a une dizaine d’années, j’ai expérimenté les premières communications intuitives dans un service de réanimation, avec des personnes dans le coma. Quand je touchais les patients pour leur donner des soins, j’entendais distinctement des voix qui me donnaient des indications », relate Christelle Dubois, aide-soignante, spécialisée dans l’accompagnement des personnes en fin de vie.
Son statut de vacataire lui a permis de travailler dans le milieu médical au sein de différents services de réanimation et de soins intensifs.
« Je travaille de nuit, c’est un créneau horaire favorable pour une meilleure prise en charge relationnelle », précise-t-elle. Et pour cause, car son approche n’est pas ordinaire ! Son aptitude médiumnique lui a permis de développer une communication d’âme à âme avec ses patients.
Des voix différentes
Les informations recueillies sont en partie pratiques, et peuvent porter sur la façon dont les soins leur sont administrés. Par exemple, un patient se plaint lors d’une communication intuitive d’un mal de dos. En le soulevant, l’équipe médicale découvre un début d’escarre, et peut l’endiguer. D’autres messages sont davantage spirituels. Une patiente, plongée dans le coma après une tentative de suicide, aurait dû partir ; pourtant, quelque chose semble la retenir. Son mari, qui a entendu parler de Christelle Dubois, entre en contact avec elle. Lors d’une séance, la jeune femme donne des détails sur son geste, s’excuse auprès des siens et fait ses adieux. Elle décède peu de temps après.
« Les voix sont différentes selon les patients », précise l’aide-soignante, qui reçoit les messages à un endroit précis, juste derrière l’oreille droite.
« C’est difficile de mettre des mots sur ce type de contact », s’excuse presque Christelle Dubois, qui avoue être plutôt cartésienne. Elle préfère nommer cette approche « communication intuitive »,
« un terme qui a été déposé par la Dr vétérinaire Anna Evans pour qualifier la communication psychique avec les animaux ». Ses expériences atypiques ont lieu avec des personnes dans le coma, essentiellement, ou sous sédation. Comment l’expliquer ? « Il semblerait que j’aie accès à l’âme du patient, seulement en état de conscience modifié », analyse l’aide-soignante. Selon elle,
« la dimension spirituelle est évidente ; il s’agit d’échanges avec l’invisible et l’intangible. La sensation s’apparente à une sorte d’osmose, dans un profond respect des deux parties. »
D’autres infirmières plaident pour cette approche
« Nous nous sommes retrouvées avec Christelle Dubois autour d’une personne presque centenaire qui “refusait” de mourir. Je m’en occupais en tant qu’infirmière à domicile, mais je me sentais très démunie sur
le plan spirituel. J’ai fait appel à Christelle pour rassurer
la patiente. Ses soins ont d’abord porté sur son corps qui était très contracté, avec des massages aux huiles essentielles dites de “passage”, une synergie d’huiles antalgiques qui favorisent l’ouverture de la conscience. La rencontre m’a semblé apaisante, et cette centenaire est décédée peu de temps après. Nous sommes dans une société où la mort est taboue, or j’y suis confrontée sans cesse. Dans le domainede la santé, il y a un véritable manque à cet égard, une approche spirituelle est incontournable pour ces accompagnements ! »
Pour le D
r Jean-Jacques Charbonier, anesthésiste réanimateur avec qui Christelle Dubois a fait équipe en 2013, cette communication serait favorisée pendant les phases où le mental serait inopérant :
« Dans le cas de coma, d’arrêt cardiaque ou d’anesthésie générale, notre conscience analytique s’estomperait au profit de la conscience intuitive extraneuronale (CIE). Cette CIE serait en fait composée d’informations délocalisées, indépendantes de la matière cérébrale et captées par le médium. On retrouve ce schéma avec nos ordinateurs qui captent les informations contenues dans des nuages électroniques délocalisés. » Des recherches ont été menées auprès de patients consentants sous anesthésie générale, ainsi qu’avec des comateux :
« Les sujets anesthésiés ont pu, dès leur réveil, valider les informations recueillies par les médiums, tandis que l’entourage des comateux pouvait souvent les confirmer », ajoute le D
r Charbonier.
Une forme d’empathie
Même s’il convient d’être prudent sur l’interprétation des échanges rapportés,
« cette communication intuitive peut permettre d’identifier les besoins du patient en fin de vie, c’est essentiel à ce stade », affirme Christelle Dubois. Si la présence d’un médium facilite cet accès, elle encourage chacun à tenter l’expérience à sa manière :
« En réalité, nous sommes tous capables de communiquer ainsi. C’est une forme particulière d’empathie. Il est possible de mettre en place des codes avec un proche, que ce soit à voix haute ou basse, en s’adressant à son âme. C’est aussi simple que : “Si tu m’entends fais-moi un signe ! ” On peut voir alors un doigt qui bouge, un coin de la bouche qui remonte. Il faut être patient. On doit parfois attendre quelques jours. Cette communication peut prendre d’autres formes, comme ressentir un besoin irrépressible de le masser, ou de lui apporter une couverture. » Au plan scientifique, aucune recherche n’a été menée sur ce sujet.
« Le milieu médical reste frileux concernant ces approches, même si individuellement, chaque soignant peut en ressentir le besoin », observe Christelle Dubois.
Avec mes collègues, ma spécificité est souvent bien accueillie, dans le sens où je mets des mots sur une faculté qu’ils possèdent eux aussi, sans forcément le savoir, même si cette communication intuitive reste confidentielle. » Quant aux familles qui font appel à Christelle Dubois, elles suivent ensuite un protocole de soins spécifiques, avec l’équipe soignante, qui répond aux demandes de leur proche, faites lors des séances de communications intuitives. Pour le D
r Charbonier, cette pratique pourrait représenter un outil précieux pour l’équipe médicale :
« Nous sommes parfois démunis face à certaines personnes, et plus particulièrement celles pour qui le pronostic vital est négatif. Les médiums pourraient nous aider à mieux comprendre les motivations d’ordre spirituel du patient. » Cette approche pourrait ainsi révolutionner le rapport à la fin de vie, que ce soit du point de vue des proches ou de l’équipe médicale, et inviter chacun à changer son regard sur ce passage que le patient est en train de franchir, qui n’est peut-être, après tout, qu’une autre forme d’évolution pour l’âme !
Un appel pour une fin de vie apaisée
En France, 600 000 personnes meurent chaque année. Pour nombre d’entre nous, ce moment, empreint de tristesse, de regrets, est effrayant et déroutant, voire révoltant. À l’occasion de la sortie de leur livre Accompagner un proche en fin de vie (Éditions Albin Michel), le Dr Christophe Fauré et le journaliste Stéphane Allix lancent un appel à un engagement éthique pour une fin de vie apaisée. L’occasion d’ouvrir une réflexion devenue incontournable et de découvrir le formidable trésor d'humanité qui se dévoile dans l'accompagnement des mourants.