Des liens invisibles unissent-ils les membres d’une famille ou d’un groupe parfois à leur insu ? Peut-on les percevoir et les influencer ? C’est ce que semblent révéler les constellations familiales, une approche psychothérapeutique à la frontière de l’imperceptible.
Art de vivre
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« Il existe indéniablement une conscience de groupe », affirme Bert Hellinger, fondateur des constellations familiales. Et nombreux sont ceux à pouvoir en témoigner, à l’image de cette jeune femme qui participe, après une tentative de suicide, à l’un des stages proposés en Suisse par le thérapeute. Ce dernier lui propose de reconstituer son système familial en choisissant des figurants dans le groupe et en leur attribuant des places dans la pièce. La constellation, qu’il guide ensuite, montre que sa mère a également tenté de mettre fin à ses jours, car son propre père s’était suicidé en se jetant d’un pont. Passation d’un schéma psychologique de génération en génération. « Loyautés invisibles », disait déjà le psychiatre Iván Böszörményi-Nagy. Lors du travail thérapeutique, le grand-père, pourtant mort, est réintroduit dans l’ordre familial. Apaisement. La mère se retrouve avec un père. La jeune femme a la sensation d’une réparation bénéfique.
Exactement au même moment, la mère réelle, qui n’avait pas été avertie des activités thérapeutiques de sa fille, traverse en Allemagne un pont qui enjambe le fleuve dans lequel son père s’est noyé. Etrange synchronicité. Ayant pour coutume lorsqu’elle passe là, de s’arrêter et de prier pour lui en regardant en amont, elle s’arrête… « mais elle eut l’impression qu’on la prenait par les épaules et qu’on la conduisait de l’autre côté du pont. Elle ressentit comme un effluve de bonheur, dont elle ne pouvait expliquer la cause », rapporte Bert Hellinger dans son livre Constellations familiales. La mère se retrouve à regarder l’aval du fleuve, emplie d’une sensation nouvelle. Effet collatéral et instantané du travail thérapeutique de sa fille ?
Les constellations familiales semblent mettre en évidence des liens invisibles, difficiles à nier tant les histoires s’accumulent, mais complexes à expliquer, entre les membres d’une même famille ou d’un même groupe.
Consteller sa famille
Bert Hellinger est un psychothérapeute allemand né en 1925. Ancien prêtre ayant fait des études approfondies de philosophie et de théologie, il passe 16 ans en Afrique du Sud dans une région zouloue avant de se passionner pour la psychothérapie. Gestalt, analyse transactionnelle, sont des apports importants pour lui. Il se formera au cri primal auprès d’Arthur Janov aux Etats-Unis et sera influencé par le travail de Virginia Satir, une psychothérapeute américaine à l’origine duMental Research Institute (MRI). Ainsi héritier de nombreuses influences à la fois théologiques, anthropologiques et psychothérapeutiques, Bert Hellinger a l’idée, dans les années 1990, de mettre en mouvement le système familial de ses patients à travers des figurants. La constellation familiale se pratique ainsi en groupe, ce qui en fait une thérapie dite brève, qui fait appel à des jeux de rôles ou au psychodrame. La personne qui travaille commence par choisir un(e) figurant(e) pour la représenter. A la suite de quoi, elle met en scène les membres de sa famille – figurés par d’autres personnes –, d’une manière qui lui semble le mieux modéliser les relations familiales. C’est là que tout commence. Le premier regard posé sur la situation qui émerge en dit généralement long. « Lorsque j’ai pris du recul et que je me suis rendu compte que ma grande sœur était collée à mon père, que ma mère leur tournait le dos, et que moi je regardais tout le monde de loin, ça m’a fait un choc… et pourtant ça représentait bien ce qui se passait à la maison », témoigne Violetta.
Mise en évidence de schémas relationnels inaperçus et pourtant prégnants. Apparition de scénarios tacites encore non dévoilés. Avènement de fidélités et de répétitions familiales jusque-là non décelées. Le refoulé, les traumas, les exclusions, échappent à l’invisible qui les rend à la conscience. « L’objet de la thérapie familiale systémique consiste à rechercher dans quelle mesure le sort d’un membre de la famille, comprise au sens large, est influencé de façon dramatique par celui des autres membres qui l’ont précédé », explique Bert Hellinger. « Nous nous occupons de regarder un ensemble de liens et de personnes qui interagissent. Le regard va surtout se porter sur les faits qui ont été décisifs et qui sont souvent liés à des traumatismes », complète Constanze Potschka-Lang. Cette formatrice en constellations familiales, qu’elle enseigne aussi à l’université Paris 8, est l’auteure de Constellations familiales : guérir le transgénérationnel. Loin d’être juste un point de vue, la vraie spécificité des constellations familiales réside dans leur dynamisme.
Titulaire d'un Master de philosophie, de diplômes de thérapie psycho-corporelle et d'homéopathie (Grande-Bretagne), Miriam Gablier s'intéresse particulièrement au potentiel humain et à l'intelligence du vivant.
Ses enquêtes sur les thérapies, la psychologie, la philosophie, la spiritualité et les sciences du vivant, lui permettent notamment de traquer les données se rapportant à la notion de conscience et à la relation corps-esprit.
Miriam Gablier est auteure de Les mystères de la conscience ...
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