Venise est tel un livre initiatique, dont s’échappent mille et un symboles magiques à décrypter dans les profondeurs de l’âme. Ici, le lion est ailé, les palais se révèlent parfois hantés et les reliques miraculeuses...
Lieux mystérieux
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Venise cultive le clair-obscur. Démons et merveilles. La beauté flirte avec les ombres. « Ces ombres ont effrayé les uns, enchanté les autres, les poètes, les artistes, les romanciers », résume François Ribadeau Dumas, dans Les mystères de Venise. Symbole de cette ambiguïté aussi magnétique qu’énigmatique, le pont des Soupirs attire les amants du monde entier... mais c’est oublier un peu vite qu’il exhale encore les plaintes des prisonniers conduits devant les juges, qui y contemplaient, d’un ultime regard sur Venise, la mort de leur liberté. Magique, occulte, superstitieuse, initiatique, cette ville d’utopie, creuset de cultures, entre Orient et Occident, bouscule notre rationalité et nous ouvre à un entre-monde.
Les figures de l’ombre
« Il y eut beaucoup de mages, de sorciers et d’alchimistes présents dans la lagune, parmi lesquels se démarquent Giordano Bruno, Casanova, Cagliostro ou encore Galilée », partage Monica Alessandra Vescovi, naturopathe et enseignante de yoga qui propose des visites énergétiques et alchimiques de Venise. Ainsi Casanova déclarait-il posséder le secret de l’immortalité (de l’immoralité, c’est sûr !) et les mystères des Rose-Croix. À certains, il se disait expert en alchimie, initié aux secrets de la kabbale et de la magie par un moine de Corfou. Il savait aussi, dit-on, opérer le « calcul en pyramide », mode de voyance très en vogue au XVIIIe siècle, et se faisait fort de converser avec les esprits. Tout ceci contraria les Inquisiteurs, et les policiers chargés de l’arrêter trouvèrent chez lui, cerise sur le gâteau, une tenue attestant de son appartenance à une loge maçonnique... Même les musées témoignent de cette attraction vénitienne pour le surnaturel : au musée Correr, on peut ainsi découvrir un antique grimoire permettant de connaître les sorts d’après les chiffres.
Énergies renouvelables
Les visites atypiques proposées par Monica Alessandra Vescovi nous relient à l’alchimie de cette ville. « Venise est située sur une ligne d’énergie : s’y connecter dans des points spécifiques, des lieux sacrés, permet d’ouvrir l’âme et le cœur. Cette cité magique est née des eaux à partir du Ve siècle, après les invasions barbares. L’élément eau est la matrice primordiale de la vie et de la régénération, elle incarne le principe féminin par excellence. De ce fait, Venise offre cette force d’accueil et son énergie nous enveloppe. Les marées, qui ont lieu toutes les neuf heures, purifient et renouvellent cette énergie », confie-t-elle. Au gré de notre exploration, nous méditons en connexion avec cet élément eau et les autres éléments, bien présents à Venise – de cette terre surgie des eaux au souffle chronique du vent, en passant par le génie du feu des fourneaux de Murano. Nous nous recueillons dans des églises chargées d’énergie, à l’image de San Zaccaria, aux multiples symboles sacrés, ou de la basilique Santa Maria della Salute, de forme octogonale. Certains y voient l’allégorie d’une couronne offerte à la Vierge, mais cette forme géométrique est aussi un puissant symbole de renaissance, de passage, car elle permet la transition entre le carré, qui représente la Terre, et le cercle, associé au Ciel. L’octogone incarne ainsi le passage entre la Terre et le Ciel, entre le matériel et le spirituel – une symbolique qui fait vibrer chaque cellule de cette cité, donc de ses visiteurs ! Lors de la Festa della Salute (fête de la santé), qui a lieu dans les brumes de novembre, on y allume rituellement une bougie apotropaïque, pour conjurer le mauvais sort... (...)
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