• Inexploré TV
  • Inexploré

Nous
sommes
la
Nature,
et
l’accepter
peut
nous
guérir
!

Longtemps, l’humain dialoguait avec les plantes, les pierres, les animaux… non comme des ressources, mais comme des alliés. Aujourd’hui, ce lien se ravive : et si se soigner, c’était d’abord réapprendre à faire alliance ?
Nous sommes la Nature, et l’accepter peut nous guérir !
Nature
« Nous sommes nés de ces mêmes eaux, de ce même air, de ce sol glaiseux, de cette lumière solaire. Nourris et entretenus par la substance de la terre vivante, nous sommes la chair de sa chair. Nous ne sommes ni de purs esprits, ni de pures âmes, mais des corps sensibles et sentants, capables d’être vus, entendus, goûtes et touchés par les êtres autour de nous. » Cette citation du philosophe américain David Abram nous le rappelle : Il fut un temps où l’être humain formait un seul et même corps sensible et animé avec la nature. Ce monde symbiotique était tissé de relations dialogiques entre les règnes. L’homme sollicitait plantes, minéraux, éléments et forces naturelles dans une relation intime et corporelle, pour résoudre ses conflits intérieurs, retrouver l’harmonie et se soigner. Les peuples racine s’en souviennent : les esprits de la nature sont nos alliés. Mais face à l’illusion moderne de la séparation, comment renouer avec le vivant ? Comment, dans nos parcours de soin, réapprendre à faire alliance, et cheminer vers une médecine de l’âme ?


Des partenaires vivants


Face au dualisme nature/culture, il s’agit d’abord de ses souvenir que nous sommes la nature. Ce déplacement du regard redonne une épaisseur relationnelle au monde. Il nous invite à ne plus considérer les plantes, les pierres ou les animaux comme de simples ressources ou objets extérieurs, mais comme des partenaires vivants. Cette perspective, qui bouleverse notre rapport au soin, ouvre la voie à une guérison élargie : non plus centrée uniquement sur l’individu, mais sur ses relations avec l’ensemble de la création. Guillaume Zeender, expert en guérison de traumas, parle pour l’être humain d’une « psyché mycéliale » : « Comme les champignons relient les arbres sous la terre, nos émotions, nos mémoires, notre inconscient sont connectés à ceux des autres. La psyché n’est pas un espace fermé, c’est une forêt », et d’ajouter, « Quand je me relie aux plantes, aux esprits de la nature, [...] je ne me sens plus seul, mon système nerveux s’apaise. Je redeviens un être relié, porté, soutenu. ».

Ce n’est pas une métaphore : c’est une réalité biologique, écologique, spirituelle ! Laurent Huguelit est un chamane occidental, qui lors d’un séjour chamanique en Amazonie péruvienne, a été désigné comme porte-parole de l’esprit de la forêt. Une expérience qu’il relate dans le livre Mère - L’Enseignement spirituel de la forêt amazonienne. Selon lui, il s’agit de se souvenir que nous sommes les fruits d’alliances plurimillénaires du vivant… « Mes ancêtres, mes arrière-arrière-arrière-grands-parents étaient des plantes. Quand je regarde l’arbre en face de moi, c’est un cousin éloigné, et ce n’est pas juste une vue de l’esprit ! On retrouve cette notion de lien familial aussi dans les grandes traditions chamaniques. » Aussi les indiens Lakotas d’Amérique du nord, nous rappelle-t-il lors des prières et rituels : Mitakuye Oyasin, « Au nom de toute ma parenté » : nous sommes tous reliés et interdépendants.


Vers une alliance des règnes


Depuis quelques années, la science confirme ce que notre corps pressentait déjà : la nature nous régule. Des études récentes montrent qu’une simple marche en forêt diminue l’activité de l’amygdale, zone du cerveau liée au stress et à l’anxiété, alors qu’un parcours urbain ne produit pas les mêmes effets (S. Kühn et al., Molecular Psychiatry, 2022). D’autres recherches révèlent que l’immersion dans un environnement naturel augmente la variabilité de la fréquence cardiaque, indicateur d’un système nerveux autonome apaisé (The Autonomic Nervous System in Its Natural Environment, 2020).

De manière synchrone aux éclairages de la science, un intérêt renouvelé pour les médecines traditionnelles et le chamanisme émerge en Occident. Jadis cantonnée aux marges, l’idée que certaines plantes mais aussi minéraux et animaux peuvent soigner par une relation profonde avec l’humain, fait son chemin. Pour les peuples Shipibo et Awajun du Pérou, les plantes dites « maîtresses » sont des esprits enseignants : la guérison ne peut se faire qu’en relation.

Laurent Huguelit, qui a passé de nombreux mois en immersion dans la forêt amazonienne, partage que « La diète des plantes nous apprend que chaque végétal ou chaque animal, sous sa forme spirituelle, aura un lien avec une maladie à guérir ou un traumatisme à transcender… Certains esprits seront plus aidants sur des aspects de mémoire ou de traumatisme, d’autres seront plus aidants pour guérir le physique. Et là, ça rejoint nos traditions aussi en Europe autour de l’herboristerie, de tout ce qui est lié à la pratique avec les plantes. » Minéraux, plantes, animaux : chaque règne offre une voie singulière. « Le monde minéral porte une sagesse ancienne, faite de mémoires planétaires et stellaires. Le moindre petit galet ramassé sur la plage est de la poussière d’étoile agglomérée, et peut contribuer à dépasser certaines problématiques ! Dans certaines traditions chamaniques, les chamanes portent simplement sur eux une petite besace avec des pierres sacrées. », et d’ajouter que « Les plantes, elles, sont porteuses de quelque chose de très maternel et d’organique : elles nous soignent dans chaque recoin de notre corps. Quant aux animaux ? Ce sont nos frères, nos sœurs. À travers eux, c’est notre lien affectif au monde qui se répare. » Selon le spécialiste, il s’agit de garder une vision globale, puisque chaque règne nous invitera à cheminer à ses côtés, à différentes étapes du chemin…


Ce que tu cherches, te cherche


Alors, comment aller à la rencontre des altérités de notre planète, dans le cadre d’un processus thérapeutique ? Pour Christine Lamour, qui pratique la communication animale, l’essentiel est dans le cœur. Elle se souvient d’un épisode marquant, aux côtés d’une ponette prénommée Désirée, qu’elle rencontra lors d’un passage dans une refuge animalier... « À notre arrivée, elle est tout de suite venue vers moi. Puis lorsque je me suis assise dans l'herbe un échange de regard profond, plein de compassion, s’en est suivi. J'ai ouvert mes bras, et elle s’est approchée… Nous avons passé un long moment ainsi, enlacées, dans le silence complet. » Dans ce corps à corps avec l’animal, Christine a le sentiment profond d’une compréhension mutuelle. Elle se sentira immédiatement après allégée d’un lourd poids, sans pouvoir mettre des mots exacts sur ce qui s’était joué... Peu de temps après, elle reçoit l’éclairage qui manquait : la présidente de l'association lui explique que la ponette avait perdu un bébé. « Ça été comme une révélation ! J'avais en effet perdu trois enfants lors de fausses couches... Nous nous comprenions avec cette ponette, elle a apaisé mon cœur, mon âme, et après cela j'ai enfin retrouvé la sérénité. ».

Se soigner en partenariat avec d’autres règnes serait-il aussi une opportunité de réparer un lien, ou plutôt, de refaire lien avec le monde naturel ? « Je pense que la guérison profonde de l'humanité aura lieu en contact avec la nature. Le point final, le point d'orgue de tout ça, c'est vraiment la réconciliation avec la nature dans son sens sacré, dans son sens spirituel… Je suis absolument convaincu que le vivant est à nos côtés, qu’il chemine avec nous et que toutes ces forces et tous ces esprits, même toute la biosphère dans son ensemble, attend de nous que l'on fasse un pas dans sa direction, un pas vers la guérison. », livre encore Laurent Huguelit.

Ainsi, renouer avec les esprits de la nature, ce n’est pas seulement convoquer une force extérieure pour soulager un symptôme. C’est se replacer dans une toile de relations, restaurer notre sensibilité au monde, notre écoute du silence, notre capacité à nous sentir vivants parmi les vivants. Se soigner devient alors un acte de réciprocité. « Nous avons besoin du monde plus que le monde n’a besoin de nous. Mais le monde désire notre attention. Il a soif de relation. », décrit David Abram. Dans leur silence, les règnes du vivant parlent un langage que notre corps reconnaît avant même notre esprit. Ce langage de la présence, du ralentissement, de l’écoute, résonne avec nos cellules. Lorsque l’humain cesse de vouloir tout comprendre et consent à simplement sentir, les alliances peuvent naître. Une médecine de l’Être, pour aujourd’hui, et pour demain ?


À
propos

auteur

  • Aurélie Aimé

    Journaliste
    Journaliste, réalisatrice et auteure, Aurélie Aimé est spécialiste du monde des spiritualités et de l'écologie. Son parcours professionnel lui a permis d’explorer inlassablement ces sujets et de partager ses découvertes. D’abord, elle a été journaliste et animatrice télé sur M6, spécialiste de « récup’ » et d’ « astuces de grands-mères » pour l’émission 100% Mag. Puis en 2014 elle a rejoint la rédaction de l'INREES, de Kaizen, puis de Natives, entre autres. Elle est l’auteure de plusieurs ou ...
flower

Les
livres
à
lire

Voir tous les livres

Les
articles
similaires

  • Se soigner avec les arbres
    Santé corps-esprit

    Le Shinrin Yoku au Japon, ou sylvothérapie, est une méthode à la fois récente et ancestrale de soin par les arbres. Reconnecter avec la nature, s’imprégner de la forêt, permettrait à nos corps et nos esprits de se ressourcer en ...

    17 mai 2018

    Se soigner avec les arbres

    Lire l'article
  • Des scientifiques s'inquiètent de l'avenir de notre planète
    Sciences

    Dégradation générale de la nature et des écosystèmes, fluctuations climatiques de plus en plus extrêmes, changement radical du bilan énergétique global... Des scientifiques révèlent dans une étude que la Terre pourrait atteindre un point de non-retour entraînant sa disparition à ...

    9 juillet 2012

    Des scientifiques s'inquiètent de l'avenir de notre planète

    Lire l'article
  • Des plantes qui enseignent aux humains
    Nature

    Les plantes peuvent être une source d'apaisement, de tranquillité, de bien-être. De là à leur « parler », il n'y a qu'un pas que les chamanes amazoniens ont franchi il y a fort longtemps.

    25 février 2013

    Des plantes qui enseignent aux humains

    Lire l'article
  • Matière grise deviendra verte
    Sciences

    Nous sentons intuitivement que la nature est source d’infinis bienfaits, sans mesurer l’alchimie subtile à l’œuvre. Pour mieux la comprendre, explorons les arcanes du cerveau et les coulisses de notre biologie qui résonnent avec le vivant.

    15 décembre 2022

    Matière grise deviendra verte

    Lire l'article
  • Rupert Sheldrake : la nature consciente
    Nature

    Dans cet entretien, Rupert Sheldrake revient sur les origines de la séparation entre l’être humain et la nature, et propose une autre conception, fondée sur l’existence de champs qui nous relient à elle.

    3 janvier 2013

    Rupert Sheldrake : la nature consciente

    Lire l'article
  • Quand les plantes éveillent notre créativité
    Savoirs ancestraux

    L’ayahuasca, médecine végétale sacrée, est avant tout connu pour induire un état de transe qui aide à conscientiser des informations inaccessibles en état ordinaire. Mais ces voyages intérieurs peuvent aussi réveiller des capacités artistiques ignorées… Notre journaliste raconte son ...

    17 avril 2017

    Quand les plantes éveillent notre créativité

    Lire l'article
  • Conscience végétale, quand la science valide l’animisme
    Sciences

    La science contemporaine ose enfin explorer ce que les peuples autochtones savent depuis toujours : le monde végétal pense, perçoit, mémorise... et dialogue. Des forêts qui se souviennent aux plantes qui chantent, chercheurs et philosophes interrogent les frontières du vivant. ...

    26 juin 2025

    Conscience végétale, quand la science valide l’animisme

    Lire l'article
  • Développer son pouvoir de création
    Inspirations

    Devenir auteur de sa vie est l’un des enjeux de la créativité. Dans la vision chamanique, nous en avons tous le potentiel, en nous appuyant sur les forces subtiles de l’univers.

    25 août 2014

    Développer son pouvoir de création

    Lire l'article
Voir tous les articles

Écoutez
nos podcasts

Écoutez les dossiers audio d’Inexploré mag. et prolongez nos enquêtes avec des entretiens audio.

Écoutez
background image background image
L’INREES utilise des cookies nécessaires au bon fonctionnement technique du site internet. Ces cookies sont indispensables pour permettre la connexion à votre compte, optimiser votre navigation et sécuriser les processus de commande. L’INREES n’utilise pas de cookies paramétrables. En cliquant sur ‘accepter’ vous acceptez ces cookies strictement nécessaires à une expérience de navigation sur notre site. [En savoir plus] [Accepter] [Refuser]