Quelle est cette « métadécouverte », titre de votre livre qui transcrit visuellement l’énergie de vos expériences extraordinaires ?

C’est un néologisme. Une « métadécouverte » s’apparente à un phénomène subtil de prises de conscience à travers les dimensions du corps et de l’esprit, jusqu’à l’Éveil.

Votre travail artistique vous permet de représenter l’irreprésentable : sorties de corps, visions colorées, dialogue avec des âmes, rêves lucides… Quels ont été les temps forts de ce voyage initiatique, que vous détaillez dans le livre ?

Dès mes premières méditations – simplement allongé, connecté à ma respiration et mon corps –, j’ai ressenti, vu et entendu des perceptions qui m’étaient inconnues. J’ai été assailli par une foule de visions qui prenaient diverses formes, certaines familières, d’autres appartenant à un monde onirique. Régulièrement, ces visions baignaient dans un univers de couleurs vibrantes. J’ai appris plus tard que ces phosphènes étaient reliés aux chakras que j’activais plus ou moins consciemment à ce stade. Mes états méditatifs se sont amplifiés, me procurant un bien-être extrême… jusqu’à devenir une fuite. « Là-haut », tout était plus simple. Sur le conseil d’un ami, j’ai consulté une médium qui m’a « prescrit » l’enracinement à l’âme de la Terre, à travers l’ouverture du chakra racine. Le plus incroyable, c’est que j’ai réellement senti mes racines descendre et se connecter, amplifiant mes visions… J’ai poursuivi mes méditations intensives, en expri-mant à mon être intérieur l’envie de vivre des sorties de corps.

Vous relatez un épisode cocasse lors de votre première sortie de corps, vécue en méditation…

Oui, j’ai traversé la porte de ma chambre et je me suis retrouvé de l’autre côté, coincé dans le parquet au niveau du buste. Ça m’a fait rire, m’évoquant les dessins animés de mon enfance. Soudain, je suis retourné dans mon corps physique et la méditation s’est aussitôt arrêtée. Cette première sortie corporelle ne m’a pas servi à grand-chose, hormis la découverte d’une nouvelle sensation. À ma grande surprise, des couleurs et une lumière éclatantes étaient présentes. Par moments, ma vision était floue. Je devenais alors une sorte de fantôme. Mais j’ai vécu une expérience plus significative, un « voyage astral », dans un état entre veille et sommeil. Mon corps était paralysé et des visions de visages défilaient devant moi. Un visage – on aurait dit celui d’un moine – m’a longuement fixé, avant de regarder le ciel. J’ai été projeté dans un immense espace, comme un hall d’aéroport, qui n’avait rien de réel. Des formes étaient en attente, mais je ne saurais dire si c’était des formes humaines… Des sons inconnus se diffusaient. Un être est apparu et a crié : « Je vais me téléporter ! » Aussitôt, j’ai retrouvé mon corps. Aujourd’hui, je me questionne encore sur la nature de cette expérience…

En introduction, l’artiste plasticien Philippe Filliot vous qualifie d’« artiste-trappeur » de l’insaisissable, en référence à votre nom d’artiste « Keight »…

Je l’ai choisi après des mois de recherche en quête d’un nom pour exprimer cette idée de transformation propre à mon parcours. Il renvoie aussi à un surnom dont on pourrait hériter d’un maître spirituel ou dans une tribu amérindienne ou africaine. Il y a aussi la consonance et l’étymologie anglophones, car ce terme, inspiré de l’anglais ancien, signifie « attraper » (catch), chasser avec des trappes, piéger… Ce jeu de mots pour dire que j’essaie d’« attraper » des expériences spirituelles par nature insaisissables.

Expérimenter ces ouvertures de conscience vous a-t-il permis d’« incorporer » le vécu de votre frère schizophrène, de le rejoindre dans sa maladie ?

À l’origine, ma démarche avait pour but d’essayer de l’aider, de le comprendre, mais surtout de garder un lien vivant. Quand la schizophrénie entre dans la famille, c’est comme s’il y avait quelqu’un de plus qui arrivait et faisait obstruction. Vivre de telles expériences m’a permis de ne pas être dans l’incompréhension ni la distance, la peur, voire le rejet. Ça m’a effectivement aidé à le rejoindre. (...)