Peut-on vous qualifier de « guerrière spirituelle » ? Qu’est-ce qu’être dans le cœur d’une guerrière spirituelle ET d’une Gardienne de la Terre ?

On peut me définir en premier lieu comme une Gardienne de la Terre et une Enseignante de la Sagesse de la Terre, ayant l’intention d’inciter les personnes à vivre de façon plus harmonieuse et plus durable avec tous les autres êtres de la Terre.
Nous savons maintenant que le bien-être des humains est inextricablement lié au bien-être du cercle de la vie pris dans sa globalité. Et, en cette période où nos actions en tant qu’êtres humains menacent la vie des êtres de la planète toute entière, nous devons nous lever de façon forte et claire contre les forces de dégradation et de destruction. Ceci implique l’acharnement d’un guerrier spirituel : avec persévérance et en suivant son cœur. Peu importe l’opinion des autres, les problèmes posés étant la continuité ou bien l’extinction de l’espèce humaine sur cette Terre.

Comment cela se traduit-il concrètement au quotidien ? Qu’en est-il de la méditation ou des rituels ?

Dans ma propre vie, j’ai décidé de sacrifier le fait d’avoir un chez-moi et une vie de famille pour me dédier à mon rôle d’enseignante itinérante. Ce choix ne correspond pas à tout le monde, mais nous devons maintenant tous décider de comment nous mettre au service de la planète pour soutenir la vie, au sens le plus large, dont notre santé et notre bien-être dépendent.

Nous devons également comprendre que nous sommes un avec la vie toute entière. La théorie du champ unifié nous rappelle notre connexion et notre communion avec toutes nos Relations sur la Terre-Mère, dont les êtres des mondes minéral, végétal et animal. À partir de ce postulat de base dérivent des principes qui peuvent guider nos actions quotidiennes. Par exemple, que soutenons-nous avec l’argent que nous dépensons tous les jours ? Est-ce que nous favorisons la nourriture saine produite de façon naturelle ? Est-ce que nous encourageons le travail éthique ? Est-ce que nous prenons soin de notre santé et de notre bien-être pour offrir le meilleur de nous-même au monde ? Pour qui travaillons-nous ? Sommes-nous fiers du but de notre profession ? Sommes-nous dans une vraie relation avec la nature qui est notre famille au sens large, ou bien passons-nous beaucoup de temps dans une réalité virtuelle ?

Au-delà du chamanisme, comment avancer sur le chemin du sacré ?

En plus de ces considérations de la vie quotidienne, une pratique spirituelle aidant à l’ouverture du cœur et à l’expression de l’amour est très importante. Basées sur la notion d’unité, les cérémonies et les offrandes sacrées peuvent être très puissants. Cependant, étant donné la situation critique de la Terre et les problèmes auxquels nous sommes confrontés, il serait illusoire de penser que des rites occasionnels aient un impact significatif.

Le chamanisme a toujours été un pont, non seulement entre les plans physique et subtil, mais aussi entre les humains et les êtres des autres règnes.
Il est donc temps que nous passions à l’acte en se souvenant qu’une cérémonie a aussi une interaction à la fois subtile et profonde avec l’univers quantique. Et peut ainsi apporter des changements profonds.

Peut-on dire que cela rejoint le chemin des Sorcières finalement, en tant que féminin qui se reconnecte à la nature et écoute son intuition ?

Celles qui autrefois ont été appelées des sorcières étaient des femmes qui incarnaient les mystérieux pouvoirs du féminin : nourrir, régénérer et guérir. Se connecter à la nature et à sa nature profonde représentait une part importante de la vie de ces femmes.
Nous sommes maintenant tous appelés à faire ces connexions profondes à la sagesse et à l’intelligence de la grande famille de la vie. Ceci implique un engagement réel et fondamental puisqu’il s’agit du futur de nos enfants. Ceci incluant tous les enfants de la vie. Nos actions, tant au plan physique que subtil, sont d’une importance vitale tandis que nous nous mettons en marche, avec cœur, sur la voie du guerrier spirituel.

Comment pourrait-on résumer votre enseignement, au cœur de cette spiritualité féminine ?

J’ai appris très vite que je portais dans mon corps l’essence de la connexion avec la terre, et que le plus important ne se situait pas dans le mental mais dans les vibrations, c’est pour cela que je travaille avec le concept de la roue de la médecine. Mes ancêtres indigènes ont toujours considéré le cercle comme étant sacré. Sa forme géométrique est une forme féminine qui par sa rondeur, englobe la globalité, la complétude du monde. Chacun est égal et censé contribuer, ce que l’on fait à l’un des membres du cercle affecte le tout. Prendre soin et se sentir concerné par les autres sont enseignées par la forme elle-même.
Je transmets aujourd’hui mon enseignement également à travers des chansons, des cérémonies, mais j’emmène aussi des groupes dans la nature pour les ramener à leurs corps. On imagine souvent que la spiritualité se situe en dehors (surtout selon la vision patriarcale) alors qu’au contraire il faut incarner cet esprit. Il s’agit d’une spiritualité pratique, sur la manière de vivre notre vie.

Concernant cette spiritualité au quotidien, vous insistez également beaucoup sur la réhabilitation des « Moon lodges », pourquoi ?

La « Moon lodge » était un lieu où les femmes amérindiennes se retrouvaient entre elles à l’écart de leur communauté pour vivre pleinement et consciemment leur menstruation, considérée comme sacrée. Il est temps que les femmes reprennent en main leur autonomie en créant ce temps et cet espace pour prendre soin d’elles et se régénérer. Cela leur permettra de développer leur sensibilité, mais aussi leurs qualités divinatoires et visionnaires pour la communauté.