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Communiquer
au-delà
des
maux
et
des
mots

Est-il possible de devenir un artisan de paix, en communiquant mieux ? C’est l’espoir que portait Marshall Rosenberg en créant la Communication non violente.
Communiquer au-delà des maux et des mots
Santé corps-esprit
Marshall B. Rosenberg est un psychologue américain né en 1934 et mort le 7 février 2015. Il est le créateur d'un processus de communication appelé Communication non violente (CNV) très inspiré par l’Ahimsa, doctrine hindoue puis bouddhiste de la non-violence, dont Gandhi fut un exemple vivant. Grâce au « Centre pour la Communication non violente » une organisation internationale à but non lucratif, il voyagea pendant 50 ans inlassablement dans le but de résoudre toutes sortes de conflits (Israel-Palestine, Kosovo…). La transmission de ses méthodes se fait au travers de formations à la CNV en France et dans de nombreux autres pays.

Depuis les attentats de janvier 2015, la violence lointaine touchant de nombreuses populations innocentes sur la planète semblait se rapprocher sur notre pays. Les actes commis depuis le vendredi 13 ont achevé ce doute : une violence innommable peut tous nous frapper. Face à l’incompréhension, de nombreux discours ont émané de la révolte. Révolte appelant la vengeance ; comme s’il existait les forces du bien et les forces du mal. Or on le sait bien « œil, pour œil et tout le monde devient aveugle ». Y aurait-il une méthode par laquelle nous pourrions entrer en contact avec nos ressentis et proposer une troisième voie ? Tel que le disait Marshall Rosenberg « Si je suis révolté contre la violence, je ne suis pas en paix avec la violence et avec ma violence. Je ne peux donc pas choisir la non-violence. La non-violence est un choix, c’est un positionnement. Je ne choisis pas la violence, car ce n’est pas le monde dont je rêve pour mes enfants ». Dans un monde ultra-violent détour par le chemin conscient de la non-violence…


La force de l’empathie


L’un des grands apports de la CNV est d’analyser les tenants et les aboutissants d’une communication habituelle, puis de proposer une nouvelle façon en nous centrant sur ce qui est juste et ajusté pour soi. En effet, nous aurions un grand pouvoir : celui de changer nos oreilles. Selon cette approche, communiquer c’est déjà écouter ; et pour cela il existe deux modes bien différents: le mode chacal et le mode girafe.

Supposons que je souhaite croire en la non-violence, en un règlement pacifique des conflits qui émergent de part en part de la planète. Une réponse typique de mon interlocuteur pourrait être : « Mais tu es nul, quelle fadaise ce discours » ! Si j’ai un type d’oreilles qui croit le jugement des autres, alors je retourne le jugement vers moi : et je me sens nul. Nul de croire que cela n’a pas de sens de croire à la paix dans ce monde ensanglanté. Le chacal en lui résonne avec le prédateur en moi… Par la suite, si je tourne mes oreilles vers lui je peux être tenté de répondre « Mais c’est toi qui es nul, tu es complètement abruti, tu n’as aucune conscience ». En mode chacal la conversation tourne vite, rien de constructif ne se construit sur un jugement contre un jugement. Avec ce mode d’écoute, je suis violent soit envers moi, soit envers l’autre. Dans un sens comme dans l’autre, je me sentirai vraiment mal !

Mais j’ai aussi le choix de mettre mes oreilles de girafe ; sachant comme le dit Marshal Rosenberg que « tout jugement est l’expression tragique d’un besoin non nourri ». Comprendre finalement que quand quelqu’un me dit son jugement, il a une aspiration qui n’est pas nourrie à la rencontre de mes croyances et mes actions. Concrètement, avec mes oreilles qui entendent « À quoi ça rime ce discours pacifique? », je vais pouvoir répondre « Ça n’a pas de sens que je veuille la paix » ? L’autre accède à la reconnaissance de son ressenti : « Oui ça n’a pas de sens ». Et moi de répondre, pour rencontrer ses aspirations : « Donc tu aimerais comprendre pourquoi je veux la paix ? » Ainsi, c’est à la rencontre des aspirations et besoins de chacun qu’une communication émerge. Communiquer effectivement vient de « communis » : mettre en commun, échanger, partager !

Grâce à mes oreilles de girafe, je peux me mettre en relation avec les autres, mais aussi avec moi. En effet, si l’empathie vers l’autre n’est pas toujours aisée, il me reste toujours la voie de l’auto-empathie… Je peux ressentir quels sont mes besoins non nourris, me sentir éventuellement atterré par les croyances de l’autre. Être en contact avec mon besoin de bienveillance, de délicatesse, de compassion et ressentir que j’aimerai tellement pouvoir partager ma conscience avec les autres ; et réaliser que je suis triste de ne pas pouvoir le faire. Mais en restant avec moi, en aucun cas je ne crois le jugement de l’autre. En un mot mettre ses oreilles de girafe permet de rejoindre le conseil du créateur de la CNV offert à la fin de sa vie. « Ma plus grande réalisation c’est que je n’ai plus jamais écouté ce que les autres pensent de moi... N’entendez plus avec les oreilles qui valident les jugements » !


Les quatre étapes de la CNV


En étant centré sur nos aspirations et nos limites, la CNV est un processus qui nous permet de créer du lien en quatre étapes :

1. Observer : énoncer des observations rigoureuses, que nous distinguons et séparons de nos jugements et de nos évaluations. Sans nul doute les événements récents ont réactivé nos peurs, tout comme un profond sentiment d’injustice. Mais pourquoi serait-ce juste ? Selon Isabelle Padovani, formatrice en CNV « en invoquant l’injustice, la question qu’il y a derrière est : croire qu’au final le juste l’emportera est-il un positionnement réaliste ? Être en paix avec la violence du monde. C’est pouvoir rester tranquille au cœur même de ce chaos ».

2. Différencier nos sentiments de nos interprétations et de nos jugements. Face à la situation de terreur « j’ai peur ». Or comme le dit Jaques Salomé : « je me rappelle que la violence reste un langage de peur, de désarroi et d’impuissance. Et non de puissance comme on le croit trop souvent ». Je prends conscience que le contraire de l’amour n’est pas la haine, mais la peur. Peu à peu en différenciant mes sentiments de mes interprétations, je réalise que j’ai peur parce que je suis renvoyé à des besoins.

3. Découvrir et exprimer nos besoins profonds (aspirations, motivations...). Face à la terreur, j’ai besoin de me sentir en sécurité, en paix. Centré sur ce besoin, je réalise qu’il est le même pour tous. Je comprends que c’est en faisant le bien que l’on détruit le mal et non en luttant contre lui. Ou comme le disait Rumi, « il existe un endroit par delà le bien et le mal. C’est là que nous nous retrouvons ».

4. Présenter nos demandes de façon positive, concrète et réalisable. À première vue, cette étape n’a pas toujours l’air réalisable. À qui s’adresser quand on veut la paix dans un monde en guerre ? Si nos destins semblent parfois soumis aux décisions des pouvoirs politiques, qui nous empêche de prendre un moment pour nous recentrer dans nos énergies et se mettre en vibration avec l’amour que l’on aime tant recevoir ?


La joie comme moteur


Ni vous ni moi ne pouvons changer autrui, mais nous pouvons observer notre monde intérieur. Porter moment après moments les valeurs dans lesquelles on croit et croît (au sens de croyance et croissance). Qui m’empêche là où il y a de la haine et de la douleur en moi de la transformer en gentillesse et en compassion ? C’est précisément la posture employée par Alain Michel, créateur du congrès mondial des Imams et des Rabbins, de la fondation Hommes de paroles qui intervient dans les zones de conflits de Sarajevo à Bagdad. « Nul part vous n’interrogerez une population civile qui vous répondra qu’elle souhaite la guerre. Nous voulons tous nous sentir en joyeux, en paix et en sécurité. Il existe des murs, mais en communiquant les humains réalisent que ce sont des murs de sable ».

Alors que reste-t-il comme moteur s’il n’y a pas de révolte ? La joie. Joie de vivre et joie d’être tout simplement. Croire que la violence va s’arrêter à l’extérieur de moi, c’est nier en partie la réalité. Elle est là. Comme le dit Isabelle Padovani : « Accepter n’est pas un mouvement volontaire. Non, je n’accepte pas et je suis là avec mon cœur brisé. Et la paix je la trouve, car je ne fuis pas l’endroit où ça me fait mal. Je suis paisible non pas parce que je sais que cela va s’arrêter. Je n’en sais rien. Mais je suis en paix parce que je vis au seul endroit ou se trouve la paix. En moi. » De plus en plus d’études s’intéressent au rayonnement de la magnitude du cœur qui pourrait s’étendre jusqu’à dix kilomètres. En utilisant l'amour comme un déclencheur pour cette conscience, nous pouvons changer notre réalité avec ces capacités co-créatives de notre conscience. En effet, tel que le dit Neale Donald Walsch « Qu’il s’agisse des guerres sans fin dans le monde ou des disputes interminables dans notre propre maison ? Le problème est le même : une énergie en conflit. Si vous souhaitez changer le résultat changez l’énergie. L’aspect extraordinaire de cette solution est que vous n’avez pas à attendre l’autre partie pour le faire ».

C’est un secret qui jusque là était bien gardé, nous savons désormais que la puissance du cœur et de la joie est infinie. Aussi si vous êtes triste, n’empêchez pas que votre cœur se brise ; aidez-le : sachez accepter la réalité telle qu’elle est. Œil pour œil et le monde est aveugle. Alors ouvrez vos yeux, et comme nous y invite la CNV ouvrez aussi grand vos oreilles…


Une sagesse à méditer…


« Lorsque vous vous dites indien, musulman, chrétien, Européen, ou autre chose, vous êtes violents. Savez-vous pourquoi? C'est parce que vous vous séparez du reste de l'humanité, et cette séparation due à vos croyances, à votre nationalité, à vos traditions, engendre la violence. Celui qui cherche à comprendre la violence n'appartient à aucun pays, à aucune religion, à aucun parti politique, à aucun système particulier. Ce qui lui importe c'est la compréhension totale de l'humanité ».
- Krishnamurti

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